INTERVIEW

Barbara Lecompte – Autrice de romans, d’essais et de pièces de théâtre

BONJOUR BARBARA, POUR COMMENCER POUVEZ-VOUS VOUS PRÉSENTER ?

Je suis autrice de romans, d’essais et de pièces de théâtre. J’ai commencé ma carrière comme conférencière nationale en histoire de l’art. Après mes premières publications, en romans historiques et essais d’Histoire de l’art, je me suis spécialisée aussi dans l’écriture théâtrale. Mes pièces sont jouées à Paris ou en région par des compagnies indépendantes. Les thèmes de mes sujets d’écriture sont souvent en lien avec l’Histoire, la Littérature ou l’Art.

QU’EST CE QUI VOUS A AMENÉ VERS L’ÉCRITURE APRÈS AVOIR ÉTÉ CONFÉRENCIÈRE ? 

La partie du travail, qui me plaisait le plus en tant que conférencière, était la recherche en bibliothèque. Je suis un petit rat de bibliothèque ! J’adore butiner parmi les livres, et finalement, j’éprouvais, au fil des années, une certaine frustration lors des conférences, des visites de musées ou des voyages culturels. Je me sentais cadrée et limitée par un horaire à respecter, un itinéraire à suivre. Lors des grandes expositions, je devais limiter mon discours, passer rapidement d’un tableau à l’autre, et je souffrais de ne pas creuser assez les sujets. Alors, j’ai commencé à écrire. Je suis une amoureuse des mots. Ce que l’on peut exprimer à l’oral, le temps d’une visite d’expo, est complètement différent de ce que l’on peut travailler à l’écrit. L’écriture est bien plus riche, plus profonde. 

ET VOUS DITES QUE C’EST TOUJOURS EN RAPPORT AVEC L’HISTOIRE ET AVEC L’ART MAIS QUAND VOUS ÉCRIVEZ DES ROMANS, SONT-CE DES ROMANS DE FICTION ?

Dans la mesure du possible, j’essaie de coller à la réalité historique. Mais effectivement, j’apporte une part d’imaginaire du romancier. Mes essais sont d’ailleurs moins des essais scientifiques que des essais littéraires, où je pars à la recherche d’un personnage historique, écrivant une biographie un peu libre. La plupart de mes pièces sont des adaptations de mes romans ou mes essais, à part quelques-unes qui sont des commandes spécifiques des compagnies théâtrales. 

En ce qui concerne “Versailles ou le jeu des dames” [spectacle joué lors du Festival de Théâtre Contemporain amateur à Châtillon], Marie-Claire Thooris, qui dirige la Cie du Rêve Rouge, m’avait demandé deux rôles de femmes fortes, de femmes mûres, qu’elle avait du mal à trouver dans le répertoire, pour pouvoir jouer avec son amie, Viviane Plagne, et donc, j’ai eu l’idée de parler de Madame de Maintenon et de sa grande ennemie, la princesse Palatine. J’ai ajouté un troisième personnage, le roi Louis XIV.

TRAVAILLEZ-VOUS BEAUCOUP SUR COMMANDE ?

Pas régulièrement. Commençant à connaître quelques compagnies, je propose mes textes et parfois, ils sont pris. En ce moment, à l’affiche à Paris, “Rembrandt sous l’escalier” est pour la deuxième saison à l’affiche du Théâtre de l’Essaïon dans le marais. Le rôle-titre est porté par Christophe Delessart de Étoile & Cie. J’ai également « Eponine, fille Théardier », une pièce qui est une adaptation des Misérables de Victor Hugo. Ma première adaptation et mon premier seul-en-scène en écriture ! Elle est à l’affiche à la Folie Théâtre, dans le 11e arrondissement. Et puis, j’ai d’autres pièces qui circulent en province, quelques dates par-ci par-là ; “Le Sacre”, une pièce qui a reçu le soutien du Souvenir Napoléonien et de la Fondation Napoléon, jouée par la Cie du Bélier de Gérard Linsolas. Et une pièce en répétition dans deux endroits différents : « Ma Belle Cousine, Bussy et Madame de Sévigné », répétée à Lyon par Gilles et Josiane Champion, ainsi qu’à Fontainebleau, par la Cie Naphralytep avec qui j’ai commencé ma carrière d’écrivain de théâtre. Ils possèdent le théâtre de l’Âne Vert dans le cœur historique de Fontainebleau, et c’est eux qui m’avaient commandé une pièce sur Rosa Bonheur, jouée au château de Rosa Bonheur puis à Paris. Ils ont également une autre de mes pièces, présentée au festival d’Avignon off 2022, “Les nuits de Georges de La Tour”, toujours à l’affiche de l’Âne Vert. 

POURQUOI VOUS ÊTES VOUS TOURNÉ VERS L’ÉCRITURE DE PIÈCES DE THÉÂTRE ?

Par le biais de l’histoire de l’art. Yves-Patrick Grima, de l’Âne vert à Fontainebleau, cherchait une plume qui connaissait aussi l’Histoire de l’Art. Il avait lu un de mes romans (Marquise au Portrait, sur l’artiste Maurice-Quentin de La Tour et madame de Pompadour) et il a eu l’idée de faire appel à moi pour créer cette pièce sur Rosa Bonheur.

En réalité, j’avais déjà écrit une pièce de théâtre, mais je n’avais pas vraiment de réseau pour la proposer à des compagnies théâtrales. Elle était donc restée dans un tiroir. Il s’agissait de la pièce “Le Sacre”, une adaptation de mon tout premier roman “Portraits d’empire” publié en 2012. Après la commande de Rosa Bonheur, j’ai commencé à écrire beaucoup pour le théâtre.

VOS TEXTES, SONT-ILS AUTANT JOUÉS PAR DES COMPAGNIES PROFESSIONNELLES QU’AMATEURS ?

Oui, c’est un petit peu les deux. Il y a une compagnie amateure de Menton qui a joué ma pièce « Voltaire en Scène » (pour laquelle il faut 3 jeunes comédiens, fille et garçons) à Nice, à Cannes, à Menton et dans des lycées. À Lyon, il y a la compagnie de Gilles Champion et Josiane qui est une compagnie amateure également. Et puis, la Cie du Rêve Rouge de Marie-Claire Thooris, en région parisienne. Les autres sont des compagnies professionnelles. Mais j’espère pouvoir continuer à travailler avec les compagnies amateures parce que je trouve qu’ils ont une vraie soif de jouer, de se faire plaisir et de prendre du temps pour que les choses soient bien faites…

CE WEEK-END UNE DE VOS PIÈCES SERA JOUÉ AU FESTIVAL NATIONAL DE THÉÂTRE AMATEUR, QUELS SONT LES SENTIMENTS QUI VOUS TRAVERSENT ?

J’ai déjà eu l’occasion de voir la pièce, parce qu’ils l’ont joué à Paris, au Théo théâtre dans le 15e arrondissement, l’année dernière. Ils vont aussi la jouer à l’occasion de la Nuit des Musées au Domaine Royal de Marly. 

Cela reste toujours une énorme émotion de voir mes textes s’incarner sur scène, dès la première lecture. Lorsque les voix des comédiens se posent sur mes mots, c’est tout de suite intéressant, émouvant. Quand on écrit, on a des intonations, des idées de voix dans la tête. Et puis lorsque les comédiens posent leur personnalité et leurs timbres de voix, cela devient vivant autrement, et ça fonctionne ! C’est la magie du spectacle vivant ! J’ai chaque fois l’impression qu’ils plongent dans mon univers d’écrivain et qu’ils donnent vie à ce que j’avais dans la tête… C’est un vrai travail de création collective qui ressemble à un grand écrin où brillent les comédiens.

EST CE QUE PARFOIS VOUS ENTENDEZ UNE AUTRE VISION DU TEXTE AUQUEL VOUS N’AVIEZ PAS FORCÉMENT PENSÉ ? UN SENS DIFFÉRENT PAR RAPPORT À LEUR PRISE EN MAIN DU TEXTE ET DES ENJEUX ?

Parfois, oui, suivant le regard de la mise en scène, cela dévoile des petites choses à tiroirs que je n’avais pas vraiment imaginé, mais qui fonctionnent tout à fait et qui sont assez surprenantes et intéressantes. C’est vrai qu’il y a différentes interprétations d’un passage du texte qui peuvent fonctionner de manière différente suivant le caractère et la personnalité du comédien. C’est là la magie. C’est pourquoi je suis assez flexible sur mon texte. Rien n’est gravé dans le marbre ! Il faut de l’humilité. Lorsque le metteur en scène me demande des petites modifications sur le plateau pour une idée de mise en scène, de jeu ou de décors, je m’adapte. C’est intéressant de travailler sur le plateau avec la compagnie. C’est un apprentissage.

POURQUOI ÉCRIVEZ-VOUS ?

J’ai toujours voulu écrire et toujours aimé écrire. Le fait d’avoir réussi à être publié, dans des thèmes que j’aime, m’a poussé à continuer. C’est une vraie respiration. Quand je n’arrive plus à écrire, je ne suis pas moi-même. Si tout devait s’arrêter là, s’il n’y avait plus rien du tout qui soit publié, je pense que je continuerai à écrire. Cela fait partie de moi. 

J’écris souvent sur des coups de cœur. C’est pourquoi lorsqu’il s’agit d’une commande, il faut vraiment que je l’apprivoise, qu’elle me parle. Il faut que le sujet me tienne à cœur et que j’aille dans cette direction de toute mon âme. Contraindre sa plume n’est jamais bon. L’écriture perd de son charme, le texte manque d’âme.

EST-CE QUE VOUS QUALIFIERIEZ VOTRE THÉÂTRE DE “POLITIQUE” OU PAS DU TOUT ? 

Oui, dans le sens où je suis une femme et une femme autrice. C’est déjà un acte en soi. Dans les personnages féminins que je mets en scène, par exemple pour Éponine, la fille Thénardier, il y a le choix de faire parler cette jeune femme, oubliée du texte des Misérables. Elle est pourtant la vraie misérable du roman de Victor Hugo, qui meurt sur les barricades après une vie de lutte pour sa survie dans la rue, un sujet toujours actuel, quand on pense aux femmes SDF d’aujourd’hui. Rosa Bonheur est un personnage historique féminin de caractère, Madame de Sévigné, également. Dans « Versailles et le jeu des Dames”, madame de Maintenon et la princesse Palatine évoquent des sujets qui sont encore malheureusement d’actualité dans le monde : ne pas avoir le droit de choisir son époux, sa religion, vivre dans un carcan sous l’éternelle autorité des hommes… Donc oui, ce sont des sujets qui me tiennent à cœur.

SI VOUS DEVIEZ CONSEILLER UNE OU DEUX DE VOS OEUVRES À QUELQU’UN QUI NE CONNAÎT PAS VOTRE TRAVAIL, VOUS CONSEILLERIEZ QUOI ?

C’est difficile de choisir. Ce sont tous mes bébés… C’est vrai que je suis vraiment enthousiaste à propos de mon adaptation “Éponine, fille du Thénardier”. Le texte est publié aux éditions Limestrale. Côté essai, je dirais “L’encrier de Madame de Sévigné”. Je suis partie à la recherche de Madame de Sévigné à travers ses objets d’écriture : ses plumes, son encrier, son bureau chinois, dans les musées et les châteaux dans lesquels elle a vécu. C’était un chemin à la fois littéraire et émotionnel.

UN MOT POUR TERMINER ?

Je suis ravie de participer à ce premier festival à Châtillon-sur-Chalaronne. J’ai déjà été en contact avec la FNCTA via Martine Talon (Comité Alpes-Maritimes) et c’est grâce à elle que j’avais pu rencontrer Katherine Lerins, de la Cie des Masques Blancs à Menton. Je sais que vous êtes très dynamiques sur le territoire et je trouve cela merveilleux, pour les auteurs et pour le théâtre !

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